La Belgique perd le commerce de la ferraille au profit des pays voisins en raison de l'interdiction de l'argent liquide

29 mars 2024, Bruxelles - À partir du 31 mars 2024, les ferrailleurs ne pourront plus payer en espèces un chargement de métaux ou de biens contenant des métaux précieux. Cette interdiction découle directement d'une nouvelle loi adoptée par le Parlement fédéral dans le cadre de la lutte contre la corruption.

Dans le cadre de la lutte contre la fraude et le blanchiment d'argent, le législateur belge avait déjà limité les paiements en espèces dans le secteur de la ferraille en 2017. Les ferrailleurs étaient depuis autorisés à payer un maximum de 500 € en espèces aux consommateurs pour chaque lot de vieux métaux ferreux et non ferreux, sous des conditions strictes. 

Le 21 mars 2024, une loi modificative est parue au Moniteur belge qui supprime totalement cette limite de 500 euros de paiement en espèces. Cela signifie qu'une entreprise qui achète des vieux métaux ou des métaux précieux à un consommateur ne peut plus effectuer de versements en espèces.

Ce changement radical a été introduit à la demande de la police fédérale et de l'inspection économique. Elles ont constaté que beaucoup se faisaient passer pour des consommateurs, alors que la régularité et le volume de leurs ventes témoignaient d'une activité professionnelle. Cela a conduit à des abus de la limite actuelle de 500 euros par l'utilisation de différentes cartes d'identité et par la "tactique du salami", qui consiste à diviser les ventes en plus petits montants afin de contourner la limite.

Denuo, la fédération du secteur belge du recyclage et de la gestion des déchets, comprend que ces mesures sont justifiées par des raisons légitimes, mais elle émet des réserves sur la manière dont elles ont été prises. Stany Vaes, directeur général de Denuo : "Nous regrettons que notre secteur n'ait à aucun moment été associé à cette décision. D'autant plus qu'il n'y a qu'une semaine ouvrable entre la publication de la nouvelle législation et son entrée en vigueur. Il nous est donc impossible d'informer correctement les ferrailleurs membres de Denuo".

En outre, l'industrie craint que cette décision unilatérale n'entraîne la fuite d'une grande quantité de ferraille vers les pays voisins. "50 % des consommateurs belges vivent à moins de 50 km de la frontière. Tant que les consommateurs des Pays-Bas, de l'Allemagne et du Luxembourg pourront vendre leurs vieux métaux contre de l'argent, de nombreux consommateurs belges vendront leurs vieux métaux à l'étranger. Par conséquent, la Belgique perd de précieuses matières premières et du pouvoir d'achat au profit des pays voisins", a déclaré Stany Vaes.

Le secteur demande donc aux responsables politiques d'inciter leurs collègues des pays voisins à prendre des mesures similaires. "Nous demandons aux ministres Dermagne et Verlinden d'aborder la question de l'interdiction de l'argent liquide avec leurs collègues du Benelux. Idéalement, la Belgique devrait utiliser son rôle de président européen pour étendre cette interdiction à toute l'Europe, afin qu'il y ait des droits et des obligations égaux pour le paiement des achats de ferraille dans toute l'Europe", conclut Stany Vaes.